Blog d'un Français qui, grâce à sa compagne costaricaine, découvre ce pays et vous le raconte,vivre au Costa Rica,couple mixte,protection de la nature,tourisme des seniors,randonnées en Amérique centrale,culture,réserves naturelles et parcs nationa
Je suis monte au sommet du Chirripo*** les 15, 16 et 17 Decembre 2016. La veille, on est venus coucher a San Gerardo de Rivas dans le lodge le plus pres de l'entree du sentier (a 50m, on pouvait difficilement faire mieux...). Le lendemain, lever a 4h ; petit dejeuner a 4h30 ; meme si on n'a guere envie d'avaler quelque chose a cette heure-la, on se force un peu en pensant aux 7 a 8h de marche qui nous attendent (15 kms seulement mais avec un denivele de 1900m). A 5h et quart, Mayela m' accompagne au debut du sentier ; il fait tout juste jour.
D'entree de jeu, le chemin monte dru la colline derriere le village ; il serpente entre les pres et des morceaux de foret ; on apercoit des vaches terminant paisiblement leur nuit. La plus grande partie du sentier est boueuse : les chevaux des porteurs, qui montent jusqu'au lieu d'hebergement aussi bien la nourriture que tout ce que les touristes ne veulent pas transporter, l'utilisent aussi et en pietinent le sol qui se transforme en bourbier a la premiere pluie ; la seule solution est de passer sur les cotes, ou subsistent des pierres ; certaines parties sont amenagees avec des troncons d'arbres enfonces dans la boue ; cela dure bien 5 kms. Dans ces conditions, il est indispensable de s'etre equipe de chaussures montantes avec de bons crampons : cela permet de garder le plus possible les pieds au sec et reduit les risques de glissades ; il n'est pas inutile non plus de se munir d'un solide baton pour s'assurer dans les passages les plus difficiles. Au km 4, on penetre dans le Parc National Chirripo proprement dit : le paysage devient plus forestier ; une multitude de chants d'oiseaux se fait entendre ; le sentier monte joliment entre les arbres. Un peu apres le 7e km, on arrive au refuge "Llano bonito" (ce qui veut dire "jolie plaine" : tout est relatif en ce qui concerne l'aspect "plat"...) ; on a deja avale 1000m de denivele ; on est au milieu du trajet : j'ai mis 4h ! Cette construction en bois date de deux ans ; on peut y acheter des boissons fraiches ou chaudes, ainsi que quelques medicaments (anti-douleurs, pommades...) ; a partir de Janvier 2017, on pourra aussi y trouver quelques plats typiquement ticos. L'endroit est gere par l'Association communale pour le Developpement touristique du Chirripo.
Apres avoir bu, mange, refait le plein de boisson energisante, je suis sans doute reparti un peu vite : en moins de 100m, une crampe a chaque cuisse m'a immobilise un long moment ; apres un bon massage, j'ai pu repartir... plus lentement. Le sentier continue a monter jusqu'au 11e km ; le paysage a change : c'est une vegetation qu'on appelle le "paramo" ; elle se caracterise par des arbres plus petits et beaucoup d'arbustes fleuris. De ci, de la, on remarque des troncs calcines : un guide du coin m'explique que, de temps a autre, durant la saison seche, des incendies se declarent dans la zone : on ne sait pas s'ils sont criminels ou provoques par la foudre. Ensuite, le sentier s'offre une pause : il descend mollement presque jusqu'au 13e km. Mais c'est pour mieux remonter juste apres : cette cote fameuse, d'un bon km, porte le doux nom d' "arrepentidos" (=ceux qui se repentissent... d'etre venus ! ) ; ce qui est terrible, pour moi, ce n'est pas tant sa pente (celle de "La cote de l'eau" est pire, a cause de la boue) que le moment ou elle arrive : a la fin du parcours, apres une descente au milieu des fleurs qui nous faisait penser qu'on approchait du Paradis... Enfin, nous y voici presque : on apercoit l'auberge des Crestones en contre-bas ; on va pouvoir manger, boire et se reposer.
A peine arrives, il faut d'abord s'enregistrer : l'Administration du Parc nous suit a la trace ; peut-etre ont-ils peur d'en perdre en route ? On me remet le paquet que j'ai confie aux porteurs ; on m'indique ou je vais dormir (chambres de 2 fois deux lits superposes) ; ensuite, seulement, on a le droit d'aller manger (a condition d'etre arrive avant 14h30, sinon ceinture...). Il est 1h30 de l'apres-mdi : j'ai mis 8h pour faire une quinzaine de kms avec une pente moyenne de 8%. Le reste de la journee s'est passe a prendre le soleil sur la terrasse et a parler avec un groupe de quatre jeunes Francais. Le lendemain, a 5h30, tout le monde est deja sur le pont : la salle a manger resonne de langues diverses mais, comme d'habitude, celle des gringos retentit sans retenue... Dehors, le temps se montre peu encourageant : un vent terrible jette une pluie continue ; le ciel bas est couvert de nuages qui filent a toute vitesse ; on ne voit pas a plus de 50m ; et la question du jour qui s'impose est : "J'y vais ? j'y vais pas ?" car il reste encore 5 bons kms et un peu moins de 500m de denivele a avaler avant de parvenir au sommet du Chirripo. A 7h, je decide d'y aller : si je veux etre de retour pour le repas de midi, je n'ai pas de temps a perdre. J'enfile un vetement chaud et, par-dessus, un immense poncho de plastique qui descend presque jusqu'au sol.
Dehors, il fait 7° : pour les Ticos, il gele ! Le vent et la pluie viennent de face. Le sentier commence tout doucement, au milieu d'une vegetation plus rabougrie que la veille ; beaucoup de petits oiseaux en sortent, peut-etre dans l'espoir qu'on va leur donner a manger. Sur la droite, on distingue la retenue sur le rio Talari ; un peu plus loin, un petit chemin file a gauche vers le Mont Ventisqueros, le jumeau du Chirripo. Il arrive que la trace a suivre se perde momentanement dans un glacis de roches : mieux vaut ne pas prendre d'initiative et garder le cap. Tranquillement, on arrive a la Vallee de los Conejos (= les lapins. Il faisait un temps a ne pas en mettre un dehors, je n'en ai donc vu aucun,.) On peut s' abriter sous une structure de metal rudimentaire. Ensuite, commencent les difficultes : la pente se fait plus severe ; il faut parfois chercher sa route parmi les amas de roches ; et, surtout, ce vent charge de pluie qui souffle au moins a 80 km/h. Je profite d'un endroit abrite pour reprendre des forces ; on apercoit le couloir qui monte sec vers le sommet qu'on devine dans les nuages. Je prends la decision d'oter le poncho qui m'a bien protege de la pluie jusque-la : le vent s'y engoufre et il se comporte comme une voile, me jetant tantot a gauche, tantot a droite. Il me reste seulement cinq cents metres a monter mais ce seront les plus durs que j'ai jamais faits ! pour vous donner une idee : des escaliers avec des marches enormes qu'il faut escalader, une pente terrible et, parfois, de l'incertitude quant a la direction a prendre. La surface au sommet est toute petite ; je peux vous dire que je n'ai pas traine pour en faire le tour ! Il parait qu'il y a un registre ou on peut inscrire son nom pour l'eternite... pas trouve. Les Ticos proclament que, de la-haut, on peut apercevoir les deux oceans : rien vu de tel, seulement des nuages et de la brume tout autour de moi ! Le retour fut assez facile, mis a part que la pluie avait transforme le sentier en rigole par endroits. A midi, j'etais devant mon assiette pret a engloutir tout ce qui allait s'y presenter... Quelques personnes qui etaient restees bien peinardes a l'auberge en esperant que le temps s'arrange me demanderent : "C'est comment la-haut ?" "Bah, c'est pas encore le Club Med : il manque le soleil et les nanas !". L'apres-midi, a l'occasion d'une eclaircie trompeuse, quelques courageux s'elancerent sur le sentier ; ils reapparurent a la nuit tombante, trempes jusqu'au slip... Quant a moi, je suis reste bien tranquille a discuter avec ceux qui avaient aussi fait "l'excursion" le matin.
Mon dernier jour dans le Parc National Chirripo a ete occupe a redescendre dans la vallee. Je pensais naivement que ce serait beaucoup plus facile que lors de la montee : en fait, je n'ai mis qu'une demie-heure de moins. Il faut dire que j'ai pris mon temps : a nouveau, il faisait beau ; j'en ai profite pour filmer de magnifiques paysages sur fond de ciel bleu eclatant et voir suer ceux qui faisaient le chemin en sens inverse m'incitait a tailler la bavette avec eux pour les encourager. L' etat du sentier, quant a lui, a cause des pluies de la veille, ne predisposait pas a l'optimisme : bien des fois, j'ai du me resoudre a descendre des pentes de travers en m'aidant du baton pour ne pas avoir a les faire sur les fesses ! et des que j'apercevais un trou d'eau ou un amas de feuilles mortes, je n'oubliais pas d'y nettoyer mes godillots en prevision du prochain bourbier... Ainsi, vaille que vaille, je suis parvenu en bas sans me casser la margoulette, mais avec les doigts de pieds en compote.
Par chance, Mayela etait venue m'attendre a la sortie du sentier ; elle m'a emmene boire une bonne biere : ah, la premiere gorgee, je peux vous dire que c'etait la meilleure que j'ai jamais bue...
*** Le Chirripo est le sommet le plus haut du Costa Rica (3822m) ; il se trouve dans la Cordillere de la Talamanca, dans la partie sud du pays.
Anecdote : Alors que je buvais un coup, entre le 2e et le 3e km, je vis arriver un petit bonhomme d'une dizaine d'annees, bien plus fringant que moi ; son pere suivait charge d'un enorme sac a dos. Pensant a mes fils au meme age, je m'emerveillai de l'entrain avec lequel le sien marchait ; le papa m'expliqua qu'il l'entrainait a randonner depuis ses cinq ans (il en avait sept actuellement) ; de son cote, le gamin essaya de me parler ; mais je ne comprenais pas ce qu'il me disait car il avait perdu trois dents de lait sur le devant ; son pere "traduisit" puis ils poursuivirent leur chemin.
Une heure plus tard, ce fut moi qui les rattrapai ; ils cassaient la croute assis sur un tronc d'arbre. Nous reprimes notre conversation : le señor en question avait une petite entreprise de tourisme dans la region et quand je lui demandai combien de fois il etait monte au Chirripo, il me repondit sans rire :"Au moins quatre-vingts fois." ; il ne comptait plus. Il ajouta qu'il etait alle jusqu'en Russie pour gravir l'Elbrouz. Je lui proposai alors de venir en France pour s'attaquer au Mt Blanc ; il me dit qu'il y pensait. Sur ce, je les laissai a leurs agapes.
Au 11e km, j'avais trouve un endroit sympa, a l'ombre, pour me refaire une sante ; ils arriverent ; cette fois, je m'etonnai du volume de leur sac a dos : "C'est que la Maman du petit m'a dit -pour lui, tu dois emporter des vetements s'il fait froid, s'il fait chaud et s'il pleut - pour toi, pareil ! - et je me suis retrouve avec quinze kgs sur le dos, mais j'ai l'habitude." J'ai ajoute : "Elles sont toutes les memes !" ; on a rigole comme deux machos qui partagent leur sujet de conversation favori.
Plus tard, quand je suis entre dans la salle a manger de l'auberge, le petit m'a crie : "Je t'ai gagne !". Y'a pas a dire, il a de la ressource. Durant l'apres-midi, je me suis rendu compte que beaucoup de Ticos venaient parler a son pere ou faire une photo avec lui...
Le lendemain, de retour du sommet, je lui ai dit :"Un partout ! aujourd'hui, j'y suis arrive avant toi." -"C'est Papa qui a peur d' y aller !". Il a tanne son pere jusqu'a ce qu'il finisse par ceder.
Le dernier jour, apres le petit dejeuner, on a echange nos coordonnees : chaque semaine, j'ai des francophones qui me demandent de l'aide pour preparer leur voyage au CR et un guide comme celui-ci n'est pas a negliger. En lisant "Warner Rojas Chinchilla"**, je ne trouve rien de mieux a lui dire que : "Ah, vous etes de la famille de l'ex-presidente Laura Chinchilla ?". Il me repond simplement que non.
Beaucoup plus tard, dans la voiture, Mayela me demande : " Il parait que Warner Rojas etait au Chirripo en meme temps que toi, tu l'as vu ?" - "Qui c'est ton Warner quelque chose ?" - " Mais enfin, c'est le seul Tico qui a gravi l'Everest ! je t'en ai parle l'annee derniere, rappelle-toi ! "... Bon, a partir de maintenant, je dois etre vigilant : sans doute, un jour, vais-je rencontrer Franklin Chang-Diaz, le seul astronaute costaricain ; ce jour-la, il ne faut pas que je sois dans la lune...
** Warner Rojas Chinchilla : quand ce Costaricain a decide de s'attaquer a l'Everest, il a fait une telle campagne dans la presse ecrite, a la tele, partout, qu'il se dit ici que chaque famille a donne son obole pour qu'il reussisse a financer son expedition.
PROCESSUS A SUIVRE
POUR MONTER AU CHIRRIPO.
1. Reservation par Internet :
+ Aller sur le site du SINAC : www.sinac.go.cr
Cliquer sur la partie "Compra y reserva" puis s'enregistrer (mettre un nom d'utilisateur et un mot de passe).
Cliquer sur l'onglet "Comprar" : "reservación en línea" Dans la fenetre qui s'ouvre, en face de "Area silvestre", choisir "Parc National Chirripo". En face de "Sector de entrada", choisir entre "San Gerardo de Rivas" ou "San Jeronimo" (le 1er est plus connu et un peu plus court d'acces). Indiquer les dates d'entree et de sortie souhaitee. Cliquer ensuite sur "Disponibilidad" : 52 personnes au maximum peuvent etre presentes dans le Parc chaque jour ; un calendrier apparait : si on veut rester 2 ou plusieurs jours dans le Parc, on prend en compte la colonne "Disponibilidad" et on paiera 18$ pour chaque jour de presence ; si on ne vient qu'un jour, on tient compte de la colonne "Visita diaria". Ensuite, en face de "Tipo de admisión", on choisit "No residente" ; enfin, on selectionne les services dont on a besoin : hebergement, repas (dejeuner = 5000 col. , midi ou soir = 6250 col.).
ATTENTION ! comme il l'est clairement dit dans les Conditions generales, cette pre-reservation ne sera definitive qu'apres paiement de l'hebergement correspondant a l'auberge Crestones :
+ pour cela, envoyer un mail a : info@chirripo.org precisant les nuits ou on va dormir au Crestones (17625 colones par nuit et par personne) ou les appeler au (506) 2742-5097 ou 2742-5200.
+ ils repondent en indiquant la somme a verser et le n° du compte a utiliser.
+ faire le transfert d'argent (cout : environ 3000 colones) dans les 10 jours a compter de la date de pre-reservation sinon on perd les 18$/jr qu'on a payes et les jours pre-reserves sont remis en vente !...
2. Se rendre sur place :
+ Venant de San Jose, aller jusqu'a San Isidro de El General ; peu apres etre entre dans cette ville, a un feu tricolore, prendre une petite route qui monte en biais sur la gauche (panneau) ; San Gerardo de Rivas se trouve a 19 kms. Au 15e km, s'arreter au Bureau des Gardes Forestiers du SINAC, sur la gauche, pour s'enregistrer.
+ REMARQUE : Si on veut commencer l'ascension tres tot (bien avant 8h), ce qui est tres souhaitable, il faut se rendre au Bureau du SINAC de San Gerardo de Rivas la veille, avant 16h30 (en effet, les heures d'ouverture sont : 8h-12h et 13h-16h30).
+ Pour se faire enregistrer, fournir le n° mis en face de "Comprobante" lors de la reservation par Internet : ce n° est de la forme "98A122" ; on vous remet alors un ticket pour chacun des jours reserves dans le Parc.
+ Ensuite, aller jusqu'au village : le Bureau du Consorcio Aguas Eternas (qui gere l'hebergement et les repas de l'Auberge des Crestones) se trouve a gauche de la route, contre le terrain de foot. On y presente sa reservation faite par Internet ou/et les tickets d'entree au Parc ; on y paie les repas qu'on va prendre a l'auberge des Crestones ; on vous donne alors des tickets pour chaque repas (On peut aussi payer ses repas directement aux Crestones, mais uniquement en argent liquide). Au meme endroit, on peut remettre ce que l'on veut confier au service de portage : il en coute 2000 colones par kg pour un voyage (aller ou retour).
On peut, enfin, se rendre a son hebergement : entre le village et le debut du sentier (moins de 2 kms), on en rencontre une dizaine ; l'hotel URAN et la Casa MARIPOSA sont les plus pres du sentier.
3. Pour etre complet :
+ San Gerardo de Rivas se trouvant a 1500m d'altitude et l'auberge des Crestones a 3400m, cela fait donc un denivele de 1900m. MAIS, plusieurs fois au cours du trajet, on redescend (avant d'arriver au Refuge Llano bonito, km7, et apres le Mont Sans Foi, km 11, surtout) : apres, il faut bien remonter ce denivele negatif ! je l'estime a 500m ; donc, denivele total : 2400m.
+ Pour avoir le maximum d'infos, il est utile de consulter le site : www.sangerardocostarica.com